On ne peut pas vraiment prétendre que j'aie eu la vie la plus rose du monde à tout bout de champ, que je suis né avec une petite cuillère en argent dans la bouche ou d'autres sottises du genre. Malgré qu'en me voyant, aux premiers abords, on pourrait parfois croire que je fait partie de ces personnes chanceuses, qui ont toujours eu leurs parents derrière le postérieur pour assurer leurs besoins et les chouchouter comme s'ils étaient la septième merveille du monde, c'est en réalité bien loin d'être le cas, comme les situations ci-dessous l'illustrent assez bien.
« - J'en ai marre de ce putain de gosse, Isa' ! T'es donc trop butée que pour arriver à comprendre ça ? Hormis me bouffer la vie depuis qu'il est arrivé, il fiche rien de bon ! Et le pire dans tout ça, c'est que tu reprends toujours pour lui, en toutes circonstances. » Je déglutissais avec difficulté en entendant mon père parler de moi de cette façon. Cela faisait une bonne demi-heure que j'entendais mes parents se hurler dessus et j'avais au départ voulu venir les voir, mais en comprenant rapidement que j'étais le sujet de conversation qui causait le souci, j'avais préféré rester dans l'embrasure de la porte à écouter silencieusement les bribes de conversation échangées entre les deux adultes. Sans peine, je pouvais voir que mon père avait encore ce liquide jaunâtre dans son verre, celui qui le rendait plus violent et méchant encore que d'habitude. Déjà qu'il n'était pas quelqu'un de très sympathique au départ, tout semblait s'empirer lorsqu'il était sous l'influence de l'alcool, c'est comme s'il était un tout autre homme.
Mes réflexions furent néanmoins interrompues lorsque j'entendis une voix reprendre la parole, cette fois-ci celle de ma mère.
« - S-S'il te plaît.. Ne me laisse p-pas.. pas e-encore.. » Je sentis mon petit coeur se serrer dans ma poitrine en entendant ma maman pleurer et la seule envie que j'avais en ce moment-même, c'était de me jeter dans ses bras et de la serrer aussi fort que je le pouvais avec le peu de forces que je possédais pour l'instant dans mes bras.
« - J'en veut pas de ce gosse, bordel ! J'arrive même à avoir plus de considération pour l'elfe de maison que pour lui, j'aurais encore préféré crever que de devoir endosser une minute de plus le rôle de père parfait alors qu'à chaque fois que je le regarde, je me dis qu'il est une erreur et qu'il ne devrait même pas être de ce monde. En plus de ça, on a déjà son frère aîné, on a pas besoin d'avoir un mec en plus à la maison, hormis une deuxième bouche à nourrir, ça nous servirait à quoi ? » Sentant les larmes commencer à rouler le long de mes joues, je décidais de ne pas écouter le reste de la conversation et je remontais à toute vitesse dans ma chambre, allant me blottir dans mes couvertures tout en enfuyant ma tête le plus profondément possible dans mon oreiller, sentant les gouttelettes salées rouler le long de mes joues.
J'aurais du m'en douter. Me montrer plus méfiant et réticent lorsque ma mère, le visage encore maculé de larmes, était rentrée dans ma chambre il y a huit ans de cela. Au lieu de ça, faisant de mon mieux pour faire comme si je n'avais pas entendu la conversation agitée que mes parents avaient eu, je m'étais jetée à son cou et m'était blotti contre elle, ne me doutant pas que ce serait la dernière fois que je la verrais et que je pourrais la serrer contre moi.
Même maintenant, que ça fait six longues années que je me suis retrouvé dans un orphelinat accueillant tout les jeunes sorciers dont les parents étaient décédés ou en incapacité de s'en occuper, j'ai encore du mal à réaliser ce que la personne en qui j'avais le plus confiance avait osé me faire en venant me déposer là. Etant un gamin simplement âgé de cinq ans à l'époque, je l'avais cru lorsqu'elle m'avait déclaré qu'elle 'reviendrait très rapidement avec une surprise pour moi, qu'il suffisait que je reste sage en attendant son retour' et j'étais resté assit à la fenêtre toute la journée à l'attendre, avant de finalement comprendre quelques jours plus tard que c'était peine perdue.
Maintenant âgé de quasiment douze ans, je me retrouvais plutôt confus face à la lettre que je venais de recevoir. Certes, ayant été placé dans un orphelinat recueillant les sorciers, j'avais toujours été au courant que je me retrouverais à Poudlard un jour ou l'autre et que ce jour allait survenir très prochainement. Pourtant, j'avais du mal à réaliser en voyant la lettre, surtout que j'avais espéré la recevoir pendant des années et des années. Ma seule motivation à tout ça ? Pouvoir revoir mon frère, Lysandre. De trois ans mon aîné, j'avais toujours eu l'espoir de pouvoir le retrouver un jour ou l'autre, malgré les nombreuses querelles que nous avions eu à l'époque où nous vivions ensembles. Après tout, nous étions frères et encore jeunes à l'époque, alors ça m'avait toujours semblé normal qu'on se chicane pour tout pour rien.
« - J'ai toujours pensé que je ne voulais pas élever un second enfant de la naissance jusqu'à ce qu'il déménage de la maison familiale. Vu ton âge, ça me semble parfait, non ? » Je scrutais la femme présente en face de moi tout en plissant les yeux. Elle me voulait quoi, elle ? Toutes les personnes qui avaient voulu m'adopter auparavant m'avaient très vite remit dans l'orphelinat où j'avais été casé, sans doute étais-je trop chiant que pour qu'ils puissent me supporter plus de quelques semaines, allez savoir. Pourtant, je me contentais de hausser les épaules à la question de la femme. De toute façon, si elle ne m'adoptait pas, j'avais toujours la consolation de savoir que les trois quarts du temps, je ne m'en rendrai pas compte, étant donné que je serai à Poudlard.
Pourtant sans que je sache trop pourquoi, la femme en question finit par m'adopter. C'est ainsi que je devins membre d'une famille à part entière. J'eus des relations plutôt électriques avec ma soeur adoptive au départ, celle-ci semblant plutôt mal accepter la venue d'un 'gamin' de quatorze ans alors qu'elle approchait à grand pas de sa majorité. Quand on dit qu'en vieillissant, les gens deviennent toujours plus cons qu'à la base, même si à mes yeux, la connerie est ancrée dans l'esprit de quelqu'un dés la naissance et finit par se développer un jour ou l'autre, quelle qu'en soit la raison, et cette nana en était la preuve vivante. Sans doute l'une des raisons pour laquelle je n'ai jamais pu la supporter tout le temps que j'ai vécu là-bas.
Après mon adoption par la famille qui était, progressivement, devenue la mienne, je m'attendais à ne plus jamais avoir de nouvelles de ma famille biologique. Et pourtant. Je fus malgré tout recontacté par Lysandre, mon frère aîné, duquel j'avais toujours été extrêmement proche malgré nos disputes d'antan. C'est ainsi que je décidais de le revoir au chaudron baveur, malgré les nombreuses rumeurs qui couraient sur son dos pas forcément très flatteuses et susceptibles d'effrayer toute personne ne le connaissant pas, telles que les rumeurs de meurtre planant sur lui. En un sens, ça ne m'étonnait pas plus que ça, mais je ne comprenais pas pourquoi il s'en serait prit à un gamin de vingt ans simplement pour le kiff, hormis peut-être une histoire de coeur, et encore. Ce fut en le revoyant que je constatais que le gamin que j'avais quitté avait laissé place à un monstre quasiment sans émotions, qui souhaitait simplement reprendre contact avec moi pour me forger et me faire rentrer dans les rangs des mauvais.
Déçu et énervé par la même occasion, je me décidais à lui tourner le dos de nouveau et de poursuivre ma vie de mon côté tout en ignorant tout les hiboux, parfois menaçants et parfois sarcastiques, qu'il m'envoyait depuis ce jour. Pourtant, depuis environ deux-trois semaines il semble avoir arrêté. La raison ? Je l'ignore et, en toute franchise, ça ne m'intéresse pas vraiment de la connaître. Avait-il était menacé par mon époux ou s'était-il simplement rendu compte que tout son cinéma m'importait très peu et s'était lassé de me harceler ? Qui sait.
Depuis quelques années déjà, j'occupe le poste de professeur de potions au sein de l'école parmi laquelle j'ai été élève à mon époque également. J'avais toujours adoré ce cours et, ayant mené des études plutôt flatteuses et réussies, plusieurs fois ont m'avait parlé du poste de potions qui allait se libérer prochainement et c'est ainsi que j'ai décidé de me lancer et de devenir prof à mon tour, prenant la relève de mon ancien professeur, même si je n'aurai jamais imaginé revenir à Poudlard malgré les merveilleux souvenirs que j'ai pu créer dans cette école. A vrai dire, je me serai plutôt vu dans une autre sorte de métier, tout à fait différente, telle que le Quidditch ou autre. Certes, j'aurai également pu rester à la maison avec mes enfants, Sinéad, adopté il y a maintenant un petit temps dans un orphelinat Londonien après qu'une amie m'aie parlé de son cas et Kaitlyn, cette dernière ayant eu ses neuf ans dernièrement. Heureusement pour moi, elle n'a jamais réussi à rentrer en contact avec sa mère, celle-ci étant retenue à l'asile sorcier depuis qu'elle avait tenté de mettre fin à ses jours pour la xième fois, mais disons que la vie de père à la maison ne m'a jamais trop tenté.