Une choppe de bière à demi pleine en main, assis vacillant sur un tabouret de bar, rien que son coude sur le comptoir avait du mal à ne pas tanguer. Il portait à ses lèvres le liquide ambré tant convoité. Enfin.. « A ses lèvres » étaient de grands mots. Encore fallait-il que l'ivresse ne l'en empêche pas. Sa chemise gouttait plus à l'alcool que son gosier lui-même à se stade de la soirée.

Pourtant, il réussissait à partir dans un grand rire tonitruant, en levant sa choppe qui peinait à garder son contenu à l'intérieur, et l'homme s'exclamait :

Arthur – Ce soir, c'est ma tournée !

Des exclamations de part et d'autres de la salles vinrent tinter jusqu'à ses oreilles dors et déjà bourdonnantes. Il était en joie et ça se voyait. Et s'entendait surtout. Si Arthur adorait Dublin pour ses nombreux pubs ouverts jusqu'à pas d'heure, Londres restait encore assez haut dans son estime. On y buvait assez bien et la population locale était sympathique.

Particulièrement lorsqu'il était entouré de quelques amis sorciers qui étaient absolument dans le même état que lui.  C'est-à-dire, joyeusement grisés par l'ivresse.  Il leur adressait d'ailleurs des coups de coudes maladroits qui signifiaient qu'il était satisfait de sa « bonne action » de la soirée. Un de ses amis, peut-être encore plus alcoolisé que lui lui balbutia quelques mots :

Kelenn – Uh... Euh.. C'est pourquoi déjà qu'on fête ce soir ?

Une grande tape amicale vint s'écraser sur le dos du pauvre Arthur qui s'étouffait du coup à moitié avec sa bière. Le plus grand du trio d'ami ne remarquait d'ailleurs même pas que l'homme était entrain de cracher ses poumons pour éviter de s'étrangler et répondait tout naturellement, d'une voix aussi forte que le physique impressionnant de son porteur :

Sven – C'est qu'il a trouvé un job auprès de sa dulcinée notre Arthur!

Un sourire béat étendit les lèvres de se dernier alors qu'il se remettait à peine de la bière avalée de travers. Il avait déjà oublié ce détail.


Arthur – Ysaliiiiiiine... , prononçait-il en posant sa tête sur le comptoir du bar, comme ensorcelé juste en évoquant le prénom de son coup de foudre amoureux.

Il avait été bête de la laisser, juste par peur de la routine. C'était lorsque l'on perdait les choses si précieuses à nos yeux que l'on se rendait vraiment compte qu'elles nous étaient indispensables. Et Ysaline en faisait partie. En plus de son travail qu'il prenait déjà très à cœur, c'était un nouveau moyen pour lui de renouer le contact et peut-être même , il avait espoir, de reconquérir le cœur de son ex concubine.

Mais ne pensez pas qu'il ne se pointait à Poudlard uniquement pour cette dernière raison. Non. Il était assez malin pour trouver toutes sortes de manières afin de retisser un lien entre eux, sans avoir à travailler sous le même toit qu'elle. C'est seulement que l'occasion se présentait, et il n'avait pas hésiter à la saisir.
Professionnellement, on lui proposait quelque chose qui lui tenait plutôt à coeur, et Ysa' le savait plus que certainement. Avec le meurtre dans l'enceinte même du château que l'on disait très protégé, les adolescents devaient tous être un peu perturbés. La nouvelle avait fait rapidement le tour du pays, et il n'était pas rare d'entendre certains parents dire qu'ils allaient faire transférer leur fils/fille, car la sécurité de l'école les inquiétait.
Arthur ne savait plus vraiment si ce n'était pas plutôt auprès des parents qu'il devait intervenir en plus des élèves pour dédramatiser la situation. Dans tout les cas, il avait un vrai boulot de fond à faire auprès de ces jeunes, dont certains devaient être encore plus touchés que d'autres.

Si l'ancien Gryffondor se sentait aussi proche de cette situation, ce n'était pas par hasard. Lui aussi avait été, durant son adolescence, enfermé dans une situation aussi choquante que douloureuse. La perte de son père, vers ses dix sept ans l'avait totalement changé. Jeune, il avait été quelqu'un d’extrêmement perturbateur, insolant et insoumis. Au fil de sa dernière année il s'était soudainement refermé sur lui-même, s'enfermant dans un cercle vicieux de peine et de colère. Et pour cause : Son père, qui avait été un véritable modèle pour lui, auror, avait été tué par un sorcier noir qui pourrissait maintenant à Azkaban. Cette perte soudaine l'avait profondément touché.

Il aurait pu mal tourner, mais il avait réussi à parler de sa souffrance qui le rongeait de l'intérieur, à un professeur. Il découvrit à ce moment le bienfait de parler, de coucher des mots sur sa peine, sur sa colère, sur son incompréhension. En moins d'un an, il avait mûri. Cette aide, il l'avait au début attrapée à contre coeur, pour finalement en faire sa vocation. Sans avoir eu quelqu'un a qui parler, sans avoir peur de se faire juger, il n'en serait pas là maintenant.

Cette main tendue dans un moment désespéré, il voulait à son tour l'offrir aux adolescents - et même adultes - qui en avaient besoin.

Kelenn – Mais … Ca ira ? demandait timidement son ami de droite, un petit brun un peu frêle mais avec le cœur sur la main. Il était loin d'avoir le tempérament franc et bien trempé d'Arthur, mais sa loyauté à toute épreuve et sa gentillesse lui avait plu. Au final ils s'entendaient bien. Je veux dire... Reprenait ce dernier à voix plus basse. Avec ce qui s'est passé dernièrement... C'est pas un peu dangereux ?

Arthur fit mine de ne pas avoir avoir entendu.

Arthur – Quoi ? Répète plus fort ! Y'a du bruit autour! Mais il ne lui laissait pas le temps et enchaînait directement, jouant sur l'état à la limite du minable dont il faisait preuve à cause de l'alcool. C'est fou comme j'ai envie de pisser ! Et le meilleur endroit pour pisser est... ?

Sven & Arthur, en coeur – La RUE bien sûr !

Les deux compères éclataient de rire, posaient quelques gallions sur le comptoir et choppaient de part et d'autre le pauvre petit brun qui ne comprenait plus rien à ce qu'il se passait et n'avait même pas eu sa réponse. Pas grave, quelques minutes après il ne se souvenait même plus de sa question.

L'important, sur le moment, c'est qu'ils aient fêtés convenablement le départ d'Arthur pour Poudlard.