« Comment tu vas, Adeline ? » Elle attrapa délicatement les tasses de thé qui volaient juste à coté d’elle, en soupirant. Son père la regardait, inquiet. Jamais il ne l’avait vu aussi fatiguée, aussi triste. Elle aurait du être heureuse, elle aurait pu l’être. Mais bien sûr, le bonheur lui avait filé entre les doigts quand l’homme qu’elle aimait était parti. Au début, elle n’avait pas compris. Elle avait cru à une mauvaise blague et puis, évidemment, elle s’était rendue compte qu’il ne reviendrait pas. Il ne reviendrait plus jamais près d’elle. Mais elle ne pouvait pas se montrer triste ou abattue. Elle n’avait pas le choix de se battre, de supporter son malheur, car malgré le dessin noir qu’elle pouvait conclure, elle avait bel et bien un rayon de lumière qui la faisait encore tenir.
« Ca va, papa. Je vais bien. » Elle prie une gorgée de son thé en lui souriant. Il n’était pour autant pas dupe. Il aimait sa fille plus que tout au monde, l’unique enfant qu’il avait pu avoir avant que sa mère ne décède. Et depuis il tentait de la surprotéger. Peut-être l’avait-il trop surprotégé.
« GRAND-PERE ! » Alderic sauta dans les bras du vieil homme sans faire attention la conversation qu’il venait de couper. Il n’avait que trois ans. Que pouvait-il comprendre du Malheur de sa mère et de l’inquiétude de son grand-père ? Tout ce qu’il aimait c’était les câlins avant de dormir et l’utilisation de son mini-balai magique que son père venait de lui offrir. Bien sûr, il pensait souvent à son père, et il réfléchissait à la prochaine fois qu’il se reverrait. Mais malgré son jeune âge, avec le temps, il comprit que la distance était une part intégrante de leur relation et que jamais, cette distance ne partirait.
« Et bien, mon petit, tu es bien en forme aujourd’hui. Qu’est ce qui te rend si joyeux ? » Les yeux d’Alderic Senior se firent plus étincelants. Son petit fils était le reste de sa vie et il comptait en profiter avant de quitter ce pauvre monde. Grand-père était malade effectivement, malade depuis bien longtemps à force de jouer avec les potions. Et un jour, il ne tiendrait plus Alderic junior sans ses bras.
« Papa m’a envoyé un balai, grand-père ! Il vole tellement haut et maman n’est pas très contente, j’ai encore cassé un vase ! » Ils riaient ensemble, tandis qu’Adeline, ne pouvait s’empêcher de regarder la scène de l’extérieur, amusée de voir que l’argent de Dragan faisait plaisir à son fils. Au moins, il servait à quelque chose.
« Où il est ce balai, Alderic ? Maman te l’a confisqué ? » Le rire cristallin s’échappa de la gorge du jeune garçon, tandis que son grand-père posa un regard désolé sur sa fille. Alderic attrapa la main de son grand-père et l’obligea à le suivre.
« Mais pas du tout ! C’est moi qui a préféré le mettre dans ma chambre, comme ça, si je casse quelque chose, c’est tant pis pour moi ! » ***
« Alderic tu veux bien descendre s’il te plait ? » Adeline ajusta une dernière fois sa robe noire et replaça une mèche de cheveux dans son chignon tenu par quelques barrettes. Elle soupira face à son reflet dans le miroir. Elle n’arrivait pas à croire qu’aujourd’hui, elle allait devoir quitter pour la dernière fois son père. Elle ne pouvait pas réussir à penser que cette fois-ci, il était réellement partie rejoindre sa mère. Bien sûr, elle le savait. Les hospitalisations à Saint Mangouste avaient été si nombreuses ses derniers mois que les médicomages ne lui laissaient plus aucun espoir. Mais pas maintenant, non pas tout de suite. Juste un peu de temps. Il était parti, sans souffrance, sans peur. Les dernières paroles qu’il avait prononcées étaient destinées à Alderic. Comme un héritage. Elle ferma un instant les yeux et essuya la larme qui coulait sur sa joue. Elle ne pouvait pas se permettre de pleurer devant son fils. Elle était forte, elle serrait forte. Une main se posa sur son épaule, elle sursauta en retournant son visage vers son époux.
« Tu es prête ? » Dragan la contempla longuement en essuyant la larme qui coulait sur sa joue. Elle réussie à prendre une grande inspiration et à lui offrir un beau sourire.
« C’est mieux ainsi. Alderic ! » Le garçon de sept ans descendit les marches, l’air triste lui voilant le visage. Il portait une cape noire sur ses épaules et sa mère avait l’impression que tous les malheurs du monde reposaient maintenant sur lui. Elle lui caressa la joue en passant une main dans ses cheveux noirs, bouclés.
« Maman… Je veux pas aller voir grand-père comme ça. » Elle se mis à sa hauteur, en soupirant.
« Moi non plus, chéri. Mais ton grand-père aurait aimé te voir une dernière fois, tu sais. Juste pour que tu lui dises au revoir. » Les grands yeux de son fils croisa son regard et il détourna la tête.
« Il avait dit qu’il serait là pour mon entrée à Poudlard, c’est la dernière chose qu’il m’a dit. » Le choc coupa le souffle à sa mère. Elle aurait voulu le réconforter, lui dire qu’il serait là, dans son cœur, mais elle savait que cela n’était pas suffisant. Alderic n’avait pas seulement perdu son grand-père. Il avait perdu l’homme qui l’avait élevé, qui lui avait fait aimé le Quidditch et apprendre les potions. Il avait perdu son seul repère paternel, malgré la présence nouvelle de Dragan dans sa vie.
« Il faut partir maintenant, ne pas rater la cérémonie. » L’Au revoir, les Adieux. Enfermé le passé dans une boite à souvenirs comme dans une boite à chaussures. Oublier qu’un jour viendra où, nous nous retrouverons, grand-père.
***
« Hum, bonjour… Je peux ? » Il retourne son regard vers la jeune fille qui vient de s’assoir en face de lui. Alderic lui sourit et la laisse s’installer. Lui aussi, il est un peu stressé par la découverte de Poudlard. Son père et lui ont été faire les courses il y a quelques jours, mais il a l’impression étrange d’avoir encore oublié quelque chose. C’est difficile de ne pas penser à son grand-père dans un moment comme celui-ci. Le train vient de partir et Alderic a l’horrible impression de laisser une partie de lui, derrière lui.
« Toi aussi, c’est ta première année ? » Elle acquiesce et remet ses lunettes qui tombent sur son nez en place. Elle est marrante avec son pull bien trop grand pour elle et ses lunettes de mouche qui camouflent ses beaux yeux verts.
« Je m’appelle Hayden. » « Et moi, Alderic.» . Et ainsi, commença une amitié forte, une amitié puissante, impossible à défaire, malgré l’éloignement et le temps.
Durant le trajet, Alderic apprit grâce à Hayden. Le monde Moldu lui avait toujours été inconnu et il était émerveillé par son savoir. Elle était belle, avec ses cheveux roux qui lui revenaient dans le visage. Elle avait les joues rosies mais sans jamais avoir l’air d’une marmite en ébullition. Elle rêvait de Serdaigle ou de Gryffondor. Il lui expliquait le Quidditch et les potions. Ainsi, le temps de voyage, ils mélangèrent culture et humour et se quittèrent le temps d’une répartition, le temps d’un repas. Hayden fini par rejoindre les rangs de Serdaigle, la maison qu’elle aimait tant, tandis qu’avec un déchirement au cœur, mais une fierté familiale, Al’ fut chaleureusement accueilli par les Gryffondors.
Ainsi la répartition d’Alderic s’achevait. Il ne put pour autant s’empêcher, de penser à son grand-père. Il aurait été fier qu’Alderic junior ait rejoint les rangs de la maison Or et Rouge. Il aurait été si fier, que comme lui, il soit devenu un vrai lion.
***
BRAVO ALDERIC !,
TROP FORT MEC TU M’APPRENDRAS ?,
ALLEZ PAYES TA BIERREAUBEURRE AL’ !,
ET MEC C’EST PAS TON FRERE LA-BAS ?, Alderic se retourna brusquement vers Viper qui le regardait d’un air mauvais. Il haussa les épaules, en soupirant. Que pouvait-il faire contre son demi-frère qui avait l’air de le détester de tout son être ? Il est vrai qu’Alderic n’avait jamais fait d’efforts avec lui, mais malgré les années qui avaient coulées, il n’arrivait pas à oublier ce sentiment de rancœur qu’il ressentait à chaque regard croisé. Son père était parti lorsque sa mère avait accouchée pour lui. Pour sa mère. Et Al’ malgré ses quatorze ans, n’oubliait pas. Il ressentit un coup dans son épaule, et il se retourna vers la fine silhouette qui lui faisait face.
« Tu as beau croulé sous les applaudissements t’arrive toujours pas à apprécier le succès ?. » Il haussa les épaules, avec un sourire en coin. Hayden le connaissait tellement mieux que la plupart de ses amis. Ils ne se croisaient plus beaucoup, mais dès qu’ils avaient cours ensembles, ils s’installaient côte à côte pour tenter de s’entraider. Alderic avait de la chance, il avait des facilités et ne travaillait presque jamais. Ou alors il n’avait juste pas envie de s’intéresser aux cours et il laissait la matière de coté. De toute façon, lui, il voulait devenir joueur de Quidditch professionnel. Il arrivait à la fin de sa quatrième année, et toute l’année avait été victorieuse pour les Gryffondor. Pour ce dernier match les Serdaigle avaient été déplumés 350 à 40. Alderic avait marqué 120 points à lui tout seul. Ainsi il avait été nommé meilleur poursuiveur du match et il n’en était pas peu fier. Pour autant, il restait humble et avait offert une tournée à Pré-au-lard à sa bande d’amis. Il n’avait pas pensé croiser le regard de son petit frère au fond de l’auberge.
« Tu devrais pas être entrain de pleurer ta défaite toi d’ailleurs ? .» Hayden le poussa légèrement avec son poing, mais sa force était minimaliste face au bloc que représentait Alderic.
« On a pas perdu ! On a simplement voulu vous laissez gagnés. » [ color=#cc0000] « Et la coupe aussi vous nous l’avez offert gratuitement ? .» [/color]
« Ta gueule, Norgarstein. » Il l’attrapa par l’épaule et la serra contre lui, hilare de la situation. Elle avait perdue une défaite mais cherchait encore des excuses. Vraiment, Hayden Mcmillan était unique dans le genre. Et Alderic appréciait tellement sa meilleure amie qu’il aurait été malade si elle n’avait pas été présente ce soir.
***
Déjà trois heures de Match pour les deux maisons et le combat n’est pas terminé, puisque le vif d’Or est toujours en jeu ! Gryffondor mène péniblement 90 à 70 contre les Serpentards ! La météo ne semble ni jouer en la faveur d’une des deux équipes et… Alderic n’écoutait même pas le présentateur du match, trop concentré à diriger son équipe pour remporter le match. La pluie s’abattait sur eux et glaçait leur sang jusqu’aux os, mais aucune des deux équipes n’auraient abandonnées. Encore moins les Gryffondors, avec Alderic en tête, qui jouait son avant-dernier match. Capitaine de l’équipe depuis plus d’un an, ils n’avaient jamais perdu un seul match sous son aile. Mais cette nouvelle équipe des Serpentards lui donnait du fil à retordre. Plus agressive, plus sauvage, ils n’hésitaient pas à foncer dans le tas, sans faire attention aux conséquences. Les Gryffondors avaient un jeu plus défensif mais qui pour le moment, portait ses fruits.
Alderic attrapa le souaffle que lui envoyait son co-équipier. Il n’arrivait même pas à reconnaitre qui c’était avec ce temps. Il se fichait pas mal, et accéléra vers le camp ennemi. Il envoya le souaffle dans le plus grand des anneaux et n’entendit même pas le résultat. Simultanément, deux cognard lui foncèrent dessus. Le craquement de son balai lui fit comprendre qu’il avait touché. Mais c’est la douleur dans sa jambe droite et dans sa colonne vertébrale qui lui arracha un cri de douleur. Le trou noir l’engloutit immédiatement.
C’est de nouveau la douleur qui le réveilla. Il ne reconnu pas immédiatement la pièce où il se trouvait. Les murs étaient d’un blanc immaculé comme si la peinture venait d’être posée. C’est quand ses yeux se posèrent sur ses habits qu’il comprit.
Il n’était venu qu’une fois à Saint Mangouste, dans les soins intensifs plus exactement pour voir son grand-père pour la dernière fois. Il se souvenait de l’odeur de potions dans les couleurs, des Médicomages avec leurs airs graves et fatigués. Il n’oublierait jamais ses murs blancs qui lui avaient fait peur à l’époque.
La porte s’ouvrit et il sursauta. Lorsqu’il découvrit ses parents, accompagnés d’Hayden, il se souvint. Il jouait au Quiddtich et il avait ressorti une douleur insupportable. [ color=#cc0000] « Qu’est ce qui sait passé ? .» [/color] Le silence lui suffit comme réponse. Il détourna les yeux de ses parents et sentit la main brûlante d’Hayden contre la sienne. Elle avait les larmes aux yeux. Il ne l’avait jamais vu pleuré.
« C’est pas ta faute, Al’. Les Serpentards ont été sévèrement pu.. » « Bordel, Hayden dis moi ce qui se passe !» Elle se mordit les lèvres en serrant un peu plus fort sa main.
« Les deux batteurs ont envoyés simultanément les cognards contre toi. Tu as été touché à ta jambe gauche et à la colonne vertébrale. Les médeci… médicomages ont réussi à sauver ton dos mais tu es sacrément amoché d’après eux. Ta jambe malheureusement a été brisée en plusieurs milliers de morceaux. Ils ont rien pu faire. » Ainsi, il avait perdu sa jambe. Amputé était le terme le plus exact. Remplacé par une prothèse pour qu’il puisse continuer à marcher. Alderic aurait accepté si il n’y avait eu que ça. Il avait été accepté quelques semaines plutôt par l’équipe professionnelle des Appleby Arrows en tant que poursuiveur. Il était l’un des plus jeunes à les rejoindre. Au moment où il avait été touché, son contrat avait été brisé. Qu’allait-il faire de sa vie maintenant ? Que ferait-il sans balai ni Quidditch ?
« Sortez… JE VOUS DIS DE DEGAGEZ MERDE ! » Hayden sursauta de peur, mais il s’en fichait. Il ne voulait plus voir personne, il détestait Hayden, ses parents, son demi-frère, son grand-père. Il les haïssait tous plus que tout. Rien ne serait plus comme avant désormais. Tout venait de basculer.
***
La situation d’Alderic fut jugée exceptionnelle aux yeux de ses professeurs et ils l’autorisèrent à tenter l’entrée en classe de Feuphénix en cursus de médicomagie. Sans grand enthousiasme il décida tout de même de tenter et il fini par rejoindre la première année, sa huitième à Poudlard. Il refuse aujourd’hui de revoir les membres de son ancienne équipe et quiconque lui permettrait de revivre le souvenir de sa chute.