❝Jade x Islay

   ♡ Souvenir d'une haine.

« Herr MacEwen, voici le vin que vous avez souhaité... Dois-je vous en servir un verre ? »

Un simple hochement de tête est suffisant à mon majordome pour comprendre, il n'a jamais eu besoin d'explication. Siegfried est ce genre d'homme qui n'a besoin que de peu de choses pour comprendre et suivre des ordres... Vous savez, c'est un allemand et celui-ci ressemble vraiment à ce que l'on peut imaginer quand l'on parle de rigueur allemande : toujours droit dans ses bottes, il suit mes ordres sans discuter, sans me flatter, respectueux, loyal, éternellement loyal... Oui, il peut ressembler à un chien, sauf que je n'ai besoin ni de le sortir, ni de lui caresser la tête en le félicitant. Enfin, je dis ceci, mais je sais que ce cracmol ne me trahira jamais, il est bien trop loyal et honnête envers moi pour ça. Un auror pourrait le tenter, un mage noir rival pourrait le corrompre... ça ne serait que cause perdu pour eux. Pourquoi une telle loyauté ? Je ne sais pas moi-même, la raison ne m'a jamais été expliqué par cet homme... Peut-être lui ai-je donné une vie alors qu'il n'en avait plus... Les humains sont des créatures très étranges, éprouvant des émotions, rêvant... Je n'ai jamais considéré les rêves comme une chose importante, je nomme ceci des situations à créer, ni plus ni moins. Siegfried rêvait-il de servitude … ou simplement d'une vie meilleure ? Tournant les yeux dans sa direction alors qu'il range les différents livres de ma bibliothèque, je regarde ensuite la bouteille de vin... Un délicieux vin blanc de Bourgogne, l'une des meilleures régions de France en terme de vin, enfin cela ne restait que mon avis. Ma main ganté se dirige alors vers la bouteille pour la prendre entre mes doigts, passant mon autre main dessus, avant de penser à la personne à qui j'allais offrir ceci...

Jade Crowley, les liens que j'ai tissé avec cette personne me semblent à la fois proche et très lointain. Proche, car je connais cette femme, elle est une personne que je respecte beaucoup, pour son esprit vif, pour ses paroles intelligentes, et sa ruse. Cette même ruse lui avait permis de nous lier par des liens invisible pour elle... En effet, à l'époque de ses fonctions d'Auror, quelque jours après qu'elle devint auror même, la jeune femme est devenue ma « Némésis », en m'empêchant de terminer un de mes plans. Elle recommença plusieurs fois, créant des situations franchement peu ennuyante. Maintenant qu'elle ne me chasse plus, je dois avouer que je m'ennuie par moment. Certes certains aurors sont doués, comme cette petite Alecia, elle devient un danger par ses talents et sa présence. Mais, ce n'est pas la même chose. Elle me hait, son esprit était tourné pendant plusieurs mois, non années, dans ma direction... Cette obsession aurait-elle par moment obligé cette jeune femme à faire des choix dépassant la morale ? Je ne sais pas... Par contre, ce que je sais est que cette obsession est la raison de cette longue cicatrice dans son dos. Même si elle n'est plus Auror, je prends contact avec elle sous l'image de cet homme de justice, mais ce soir, je me préparais à lui parler, sous le masque de Nechtan. Me levant alors, j'ordonne à Siegfried de préparer la bouteille dans sa boîte pour le transport, ainsi que le petit bonus que je compte lui offrir. Peut-être me hait-elle, mais Nechtan lui adorait ces chasses...

Disparaissant dans les souterrain de mon manoir, je me pose devant une armoire, l'ouvrant pour reprendre le style de vêtement qu'elle connaît à Nechtan : de sombres vêtement bien entendu, veston à col mao, long manteau de cuir, pantalon disparaissant dans des bottes à sangles. Glissant un masque cendré sans visage sur la totalité de mon crâne, masquant ainsi mes cheveux, mon visage et la forme de ma tête à tous les regards. Je voyais à travers de la matière qui m'avait permis de formé le masque, à la fois solide et léger. J'enfile des gants à mes mains, ouvrant et fermant mes doigts. La proie de Jade Crowley réapparaît enfin... Un nom pour identifier pleinement une personnalité reste un moyen intelligent de garder le contrôle d'une situation. Le jour où elle saura qu'Islay est Nechtan, que Nechtan est Islay, je ne sais comment la situation évoluera, il faudra s'attendre à recevoir des sortilèges et de les parer rapidement... Me regardant à travers le masque dans un miroir, je ne peux m'empêcher de sourire en repensant à ces chasses et à ces duels. Ce serait amusant de retourner à cette époque. Enfin... l'heure de donner les cadeaux arrive. Quand je prends les différents présents, je remarque le visage surpris de Siegfried. Cela fait longtemps qu'il ne m'a pas vu dans cette tenue, m'explique-t-il. Je ne prends pas le temps de lui répondre, je vais être en retard sinon...

Je transplane alors, arrivant devant la résidence de la demoiselle dans un léger bruit, tandis que la pluie commence à tomber. Déverrouillant par magie la porte, après avoir détecté et annulé les différents système de sécurité, je ferme sans verrouiller, marchant dans le couloir pour atteindre le salon, déposant la boîte de la bouteille de vin sur un meuble, tandis que le bonus, une boîte à musique, lévite jusqu'à la table basse, se mettant alors en route. L'orage commence peu à peu à se faire entendre, tandis que la porte s'ouvre. Je m'installe dans le fauteuil de son salon, une baguette -  pas ma baguette habituelle, une que j'ai dominé en la désarmant à son propriétaire - en main. La douce musique résonne alors dans la maison, je tends doucement la baguette e't dès qu'elle s'approche du salon, les bougies de la pièce émettent des flammes pâles.

« Il est dangereux d'utiliser l'électricité en plein orage... Je n'aimerais que le courant ne passe plus entre nous. Bonsoir... Mlle Crowley... »

Une magie sur le masque modifie suffisamment les fréquences de ma voix pour la rendre plus sombre et méconnaissable, sans créer une voix ridicule bien entendu.

I'll catch you

Il y a de ces jours où je sens ce poids au fond de mon ventre. Celui qui me dit que quelque chose de mauvais va arriver. Je me souviens qu'étant toute jeune j'ignorais ce sentiment avec véhémence, surtout par peur. Mais aussi par manque de courage. Après tout, ce n'est pas pour rien que je ne suis jamais allé à Gryffondor, n'est-ce pas? Pourtant j'ai eu ma leçon et j'ai rapidement appris que quand on voulait être celle qui porterait l'armure et non celle qui mettrait les chaussons de verre et la robe à crinoline, il fallait s'en faire pousser, du courage. Il n'est donc pas utile de préciser que maintenant si cette soudaine pesanteur me prends, je réagis comme tout auror digne de ce nom : J'enfile ma cape de parano et n'hésite pas à prendre autant de précautions que possible. Surtout sur ma maison. Deux ans de retraite ne m'auront pas suffit à perdre mes réflexes d'auror apparemment.
Bien sûr, malgré toutes ces précautions supplémentaires, le poids refuse de s'en aller. Il ne le fait jamais vraiment parce que, bien entendu, ces précautions n'empêchent pas réellement ce genre de choses d'arriver. J'en suis donc réduite à espérer une première ou seulement que j'ai pu prévenir le pire.

J'ai donc le pas lourd en revenant chez moi ce soir-là. Toute la journée était déjà de ce gris tirant sur le violet, si caractéristique de l'orage qui pointe, sans compter le fait que malgré le fait que l'on soit encore l'été, devenir professeure de DCFM et entreprendre un déménagement loin de ma petite maison au fond de la campagne britannique m'a demandé d'avoir la tête dans la paperasse et les affaires les plus ennuyantes que le monde magique et moldu combinés aient à offrir. Mais je n'ai pas la démarche d'une condamnée à mort pour cette raison. C'est parce qu'il n'est toujours rien arrivé et plus l'heure avance, plus je me vois devenir inquiète. Cette inquiétude se confirme d'ailleurs lorsque j'arrive devant chez moi et qu'en tentant de désarmer les deux ou trois charmes les plus agressifs que j'ai posé. À cet instant mon coeur se serre et je monte les escaliers en quatrième vitesse, mes jointures blanchissant autour de ma baguette et agrippant mon sac de mon autre main.

Les marches ne se franchissent pas assez vite à mon goût alors que je m'élance vers la porte. Une fois devant celle-ci, je m'apprête à déverrouiller quand je sens la poignée tourner sans problème. La porte semble grincer comme pas permis alors que finalement, l'orage débute avec un vrombissement de tonnerre lointain. Mon coeur se serre d'autant plus dans ma poitrine et je sens l'adrénaline monter. Soit j'ai affaire au voleur le plus stupide qui existe à ce jour, soit son méfait est déjà commis et je ne pourrai que constater ce qui manque. J'entre donc d'un pas calme et assuré et lance un lumos imprononcé. Alors que j'aurais d'abord cru la maison complètement silencieuse, cela devient rapidement clair qu'une mélodie joue, sur une tonalité de boite à musique. Les premières notes ne m'évoquent d'abord rien - ce qui n'est déjà pas rassurant vu que je suis chez moi et que je n'ai aucune boîte à musique - puis je la reconnais.

C'était cette mélopée qu'on pouvait entendre sous les craquements et les bruits des sorts de mon dernier duel qui fut réellement mémorable et non pas une pauvre tentative de se défendre sous le coup de la surprise. C'était la dernière fois que je m'étais retrouvée avec Nechtan. Je l'avais presque eu, mais par un coup de bluff, il avait réussit à s'enfuir. L'adrénaline qui m'avait d'abord submergée - agréablement je dois dire - se met aussitôt a me glacer le sang. Je deviens confuse et ne sait plus quoi penser. Chaque personne qui a su qu'encore aujourd'hui, je récolte des informations sur lui et qu'un babillard quelque part dans la maison est encore dédié à son cas me répète que je devrais oublier cette histoire : « Ce n'est plus de tes affaires Jade, il est disparu, plus personne n'entendra jamais parler de lui, tu n'es plus auror, alors arrête. » Pourtant ça n'a jamais été logique pour moi. Nechtan n'est pas partit, il n'a pas arrêté et personne n'arrivera à me convaincre du contraire. Qu'importe si il a pu changer de nom, d'apparence ou même de manière de procéder, il est encore là-bas, quelque part et il n'a pas cessé ses activités. Je le sais, je le sens au fond de mes tripes. Je ne sais pas si c'est lui ou quelqu'un qui sait pour ce dernier duel qui est à la source de cette musique, mais je dois savoir de quoi il en retourne.

Mes pas se concordent donc à mon ouïe alors que je suis la musique pour en trouver la provenance. Cela me mène vers le salon, qui s'illumine peu avant que je l'atteigne. Mon souffle se coupe et dans un réflexe je rabaisse ma baguette en mettant fin au lumos et me replace de manière plus défensive. Il y a donc bien quelqu'un... la pluie bat maintenant son plein au dehors et vient frapper les carreaux des fenêtres, me permettant de garder mon calme de par son rythme apaisant ; dire qu'il y a deux ans, je n'aurais même pas été près de perdre mon calme dans une telle situation. En un pas néanmoins je reprends contenance et entre finalement. Jamais Nechtan ou quelqu'un ayant un quelconque rapport à lui ne me verra perdre mes moyens. Jamais.

Cette promesse en prend pourtant un coup quand je vois qui est là. Malgré la lumière chaude et basse que les bougies offrent, je le reconnais. Ce très cher Nechtan. Exactement comme avant. C'est presque effrayant qu'il soit aussi identique après deux longues années. C'est un peu étrange à mon goût. Ma baguette est désormais braquée sur lui et je l'observe, assis dans mon fauteuil, à son aise, une boite à musique finement sculptée posée sur la table basse et émettant la douce mélopée qui me ramène tant de souvenirs que je ne saurais qualifier de mauvais ou bon, au final. Sa voix, artificielle et parfaitement calme s'élève dans l'air. Il me fait un trait d'esprit comme il sait si bien les faire et je fronce les sourcils, ramenant le bras qui ne tient pas ma baguette sous ma poitrine, ma mère pressant mes côtes derrière mon bras armé, question de ne pas céder à l'impulsion que j'ai de le tuer sur le champ. Je le hais, mais ce serait idiot de ne pas tenter d'avoir les réponses à mes questions.

« Bien sûr, nous qui partageons une si belle synergie.» répondis-je, acerbe.

L'espace d'une seconde je fronce les sourcils d'un air pensif. Je ne peux pas nier qu'en fait... il y a une certaine synergie entre nous, surtout dans les combats. C'est peut-être même ce qui a toujours fait que ni lui ni moi ne sommes jamais arrivés à mettre fin une bonne fois pour toute à cette chasse. Ça et le fait qu'il semble toujours en tirer un certain plaisir. Jamais je ne l'ai montré, mais cela me frustre au plus haut point, autant parce que je fais plaisir à cet être immonde que du fait que... moi aussi, je m'en amuse. Cela me donnerait facilement un cas de conscience si je n'arrivais pas si aisément à occulter mes ressentiments. J'ajoute aussitôt, pour ne pas me mettre ne plus à tergiverser de cela avec lui.

« Si tu es venu ici pour me tuer une bonne fois pour toute, ne te perds pas en courtoisies, je te pries. Après tout ça ne t'as pas étouffé il y a deux ans. »

Mes pieds s'ancrent bien au sol et je fixe son masque sans visage. Après deux ans sans le voir, je me souviens maintenant à quel point cette vision était dérangeante et cela envoie un frisson dans mon dos. Ce frisson provoque une légère douleur à ma cicatrice, mais je ne cille pas le moins du monde. Je suis habituée à bien pire.Ce à quoi je ne suis pas habituée par contre - personne ne doit l'être en ce bas monde d'ailleurs - c'est d'attendre la réponse de mon pire ennemi dans mon salon, après qu'il soit entré par effraction. Bien sûr je pourrais tenter d'alerter les aurors, mais ce serait lui offrir quelques secondes d'avantage, sans oublier que... j'ai des comptes à régler. En commençant par celui de ma cicatrice.

It's my last ambition

(C) Mini BN sur Epicode.

❝Jade x Islay

   ♡ Souvenir d'une haine.

Les notes de la mélodie s'envolent doucement dans cette pièce sombre, les flammes éclairant d'une lueur chaude dans un rayon bien trop limité pour être véritablement efficaces. Mais cela me convient amplement, cette ambiance sombre est une situation parfaite pour la scène qui se joue en ce moment. Jade Crowley... il m'est impossible d'oublier ce visage, cette chevelure sombre, ces orbes cyan dans lesquelles baignent haine et obsession. Oui, je connais ce regard, je le reconnais. D'ailleurs, je n'ai jamais quitté ce visage, elle et moi... sommes tout de même des amis. Nous parlons du monde, de la vérité, de la morale, du système étrange. Nous étudions les actes du Passé ensemble, nous imaginons l'Avenir... Ou peut-être dois-je parler à l'imparfait. Il y a deux ans, un drame s'est déroulé... Peut-être que je dois, mettre en scène, pour vous, cette scène... L'une des seules choses que je regrette. Il y a deux ans donc, Jade Crowley était une Auror douée, puissante. Elle était accompagnée d'une autre chasseresse de mage noir : Cassandre Waleston. Tous les trois, à l'époque, nous nous entendions plutôt bien. L'on me trouvait souvent en leur compagnie, à faire ce que j'ai déjà expliqué plus haut : nous parlions d'avenir, de passé, de morale, de vérité. Bref, nous parlions de la nature humaine. Toutes deux étaient les plus grandes ennemies de mon alter-ego, Nechtan... Il est vrai que j'ai souvent croisé « le fer » avec Jade, mais Cassandre n'était pas une ennemie à prendre à la légère. Toutes deux avaient leurs qualités, qui s'harmonisaient parfaitement. J'ai combattu une seule fois Jade et Cassandre réunie, j'ai dû danser armé non pas par une baguette que j'avais dominé, mais avec ma vraie baguette. L'une de mes « traditions » lors d'un combat contre un sorcier est que je le désarme, que je m’octroie l'allégeance de sa baguette magique... Ma baguette en bois d'If n'est utilisée que pour les moments les plus importants pour moi... Bien entendu, il y a toujours eu un risque que l'une d'entre elles découvrent que cette baguette est liée à moi, mais aucun problème. Nous avons donc combattu tous les trois, j'ai failli perdre la vie cette nuit là, à cause d'un sort parfaitement maîtrisé par Cassandre. Et pourtant, ce combat là ne fut pas le dernier. Le dernier duel que j'ai effectué, face à Jade uniquement, lors duquel cette mélodie se jouait, avait lui aussi été très juste pour moi. Tous les Aurors ne sont pas aussi talentueux que Jade... le poste de Chef du Bureau des Aurors lui aurait été comme un gant.

Mais un drame modifia toute cette délicieuse alchimie, cette chasse que j'appréciais particulièrement. En faisant des recherches sur moi, elles ont décidés de retourner dans un des endroits dans lequel nous nous sommes battus, un repère... Une erreur, une grosse erreur. J'avais appris bien trop tard qu'elles étaient alors parties pour cet antre. Le dragon ne s'y trouvait plus, mais plusieurs rats s'étaient installés là, c'est en tout cas ce que j'avais entendu. A cette époque, je faisais déjà parti des Mangemorts, mais nous avions décidé d'attendre le bon moment pour agir, alors je n'apparaissais seulement comme un mage noir indépendant. Ce petit groupe qui avait pris contrôle des lieux n'était en rien lié à cette secte, ni même à moi... Il ne m'a pas été difficile de les tuer, visage caché par mon masque, devant le corps inconscient de Cassandre et la silhouette ensanglantée de Jade. Pourquoi celles qui me traquaient n'avaient pas vérifié plus en détail ? Je dois avouer avoir ressenti une profonde haine, car les deux seules aurors qui arrivaient à me pourchasser, à comprendre ma malice, se trouvaient à mes pieds. J'ai tenté de sauver Cassandre, mais il n'y avait plus d'espoir pour elle. J'ai soigné une bonne partie des blessures de Jade, rapidement, je ne voulais pas non plus être pris sur les lieux du crime... Puis en partant, j'ai contacté par magie la brigade d'Auror la plus proche. C'est à ce moment là que Nechtan à disparu de tous les radars : j'ai changé de look, et j'ai utilisé mes informations pour éviter au mieux la rencontre avec Jade. Mais elle a toujours été obsédée par Nechtan, encore maintenant...

Oui, je le vois à ces yeux... Elle me hait, cette haine se transforme en obsession. Combien de fois ai-je entendu dans sa voix la frustration de ne pas m'avoir vaincu définitivement, d'avoir laisser Cassandre mourir... Pour elle, Nechtan est coupable... Elle n'a pas tout à fait tord, ce repère était tout de même un ancien lieu à moi. Un éclair déchire le ciel, sa voix résonnant dans mes oreilles. Pour elle, je suis coupable d'avoir tenu la baguette qui a tué Cassandre, d'avoir tenu la baguette qui a fait cette cicatrice. Je ferme les yeux derrière mon masque, continuant d'écouter la musique, avant de me lever... La musique s'arrête, la dernière note résonne dans cet espace sombre... tandis que ma voix l'accompagne.

« Machiavel un jour, a écrit, ou dit : On s'attire la haine en faisant le Bien comme en faisant le Mal. Je dois dire que j'avais du mal au départ pour comprendre cette phrase. Selon la nature humaine, le Bien défini par l'Homme n'offre pas la haine, il offre le bonheur, la justice... J'imagine que mon manque de compréhension vient du fait que je ne considère pas le Bien et le Mal comme des choses concrètes, mais des mots que l'on utilise pour dicter des lois, pour former un système, pour excuser les actes crapuleux des gens « honnêtes » et pour arrêter ceux des gens comme moi. Mais, j'aimerais te poser deux questions, Jade Crowley. Depuis combien de temps nous connaissons nous ? Depuis combien de temps me traques-tu ? »

Je m'avance alors, la baguette toujours en main, tandis que je me poste devant elle, posant la pointe de ma baguette sur son front, bougeant doucement les mèches de ses cheveux, avant de me diriger vers la bibliothèque, la main tournée pour toujours garder la baguette pointer sur elle. Je la décalle rapidement, un petit mouvement de poignée, la boîte à musique reprenant son air, tandis que je la vise à nouveau. Mon index se pose sur un livre, le sortant doucement, regardant alors le titre, avant de le reposer à sa place, me tournant ensuite vers elle.

« Tous ceux que j'ai combattu pour survivre, ont soit été tué par un sortilège, soit utilisé pour certaines choses ou, au mieux, torturés pour relâcher. Je veux que tu réfléchisse, un peu, à ce que tu penses, à ce que tu dis, et à ce que tu sais de moi. Nous nous amusions bien, tous les trois. Pourquoi aurais-je arrêté ce petit jeu. Pourquoi aurais-je tuer les deux « princesses » qui avaient la confiance et la puissance de traquer le dragon que je suis. Ce jour là, une brigade est arrivée, ce jour là, tu étais la seule survivante... Depuis quand... les Aurors utilisent-ils des sortilèges impardonnables pour tuer  des mages noirs ? »

Je la fixe, gardant ma baguette dans sa direction, avant de retourner m'asseoir sur le fauteuil.

I'll catch you

Nechtan me regarde, je le sens. Avec les années, j'ai appris à passer par-dessus le trouble que provoquait un tel masque sans visage et me préoccuper plutôt du langage physique, dont la position de la tête notamment pour savoir si il me regardait. Cela me dérange à chaque fois, sentir un visage absent me regarder. Ça me donne envie de me jeter sur lui et lui arracher son masque. D'ailleurs c'est certainement l'une des raisons qui me pousse à l'obsession pour son cas. Je me vois partagée entre une furieuse curiosité et une haine profonde et sais très bien que je n'aurai de répit que le jour où je verrai un visage sur cet homme.

En arrière-plan de ce qui est à la fois un échange de regard et une adresse non réciproque, la musique s'affaiblit lentement et les dernières notes semblent envahir la pièce d'autant plus que les premières, laissant le temps à un genre d'écho de se faire entre deux d'entre elle. C'est à ce moment que Nechtan choisit de parler d'une voix si impersonnelle et si étrange. Une longue diatribe, débutant par une citation, comme c'est une habitude assidue de sa part. Cet homme est ainsi, se servir de citations, c'est s'approprier un peu l'esprit des plus grand, car si eux l'ont dit, lui les vit. Tel est ce que j'en ai déduit, mais depuis ma retraite anticipée de chez les aurors, je remets tellement tout en question... pour éviter d'y penser d'ailleurs, je répond à ma némésis sur un ton dur et une expression digne de cela.

«Je te connais depuis assez longtemps pour savoir que tu es capable du pire et te traque depuis assez longtemps pour savoir que ça ne pourra être que moi qui t'arrêteras un jour. »

C'est totalement en référence à la dernière rencontre que nous avons eu. C'est une chose qu'on ne me prendrait jamais à avouer, mais que Nechtan ait orchestrée une telle embuscade contre nous ce jour-là, ça a été comme une trahison. Jamais avant il n'avait été aussi lâche avec nous et sans être retenue par le devoir d'auror, je me permets de lui en tenir rigueur. Qui plus est, je juge n'avoir dit aucun mensonge. Ni sur ses capacités, ni sur la traque. Ce dernier point pourrait d'ailleurs être jugé comme de l'arrogance de ma part, mais je me doute fortement que Nechtan sait déjà cela aussi bien que moi.

Sa baguette, ou plutôt celle d'une de ses victimes, vient effleurer mon front et repousser une mèche. Une action qui vient envoyer un frisson de dégoût dans ma colonne vertébrale, cela faisait longtemps que je n'avais pas eu le moindre contact avec lui, surtout physique et j'aurais au final sans doute préféré. Alors qu'il va vers la bibliothèque et que sa baguette reste pointée sur moi, je jauge un instant la possibilité de le tacler, mais c'est Nechtan, son attention portée ailleurs n'est que factice, au moindre mouvement, c'est le stupéfix qui m'attends. Un mouvement exécuté par lui, puis la musique reprends. Je me concentre sur elle tout en apercevant mon pire ennemi toucher l'un de mes livres préféré, les fleurs du mal. Cette musique agit comme un calmant et permet à mes idées de s'éclaircir. Pour peu, on croirait qu'il avait prévu un tel effet. Il élève d'ailleurs à nouveau la voix et cette fois seulement, arrive à me prendre de court. Je reste interdite face à ses mots. Depuis deux ans, tout avait été imaginé de ma part - la théorie d'une embuscade orchestrée par lui, mais perpétrée par des tiers ayant été la plus populaire - mais absolument aucune ne prévalait une absence totale d'implication de la part de Nechtan. Cette idée remet tout en cause et me provoque une confusion profonde. Et si... et si ça n'avait pas été de lui. Et si tous les coupables - sauf moi et ma hâte - la mort de Cassandre avaient définitivement payé pour leur crime? Mes lèvres se mettent à trembler, ce que je cache en pinçant mes lèvres, l'air pensive. Il y est arrivé, je suis sous le choc.

Il reprend sa place et me scrute. Et soudain, je prends un calme apparent. Ma baguette se lève et je le pointe, résistant de peine et de misère à l'attaquer directement. Il n'a pas tort, mais je n'ai pas à le croire. Après tout, les aurors n'avaient pas à les tuer, surtout pas après qu'ils s'en soient pris à nous. Les aurors auraient voulu les questionner, les juger et les voir embarqués à Azkaban pour la mort d'une des leurs. Et pourtant, ça pourrait être un habile jeu pour tenter de m'amadouer. Entre ma logique et ma méfiance exacerbée d'ex-auror, je ne sais pas quoi choisir.

« Donnes-moi une seule raison de te croire, Nechtan. Une seule raison qui me mènerais à ne pas te tuer ce soir. » lui sommai-je froidement.

Ce qui avant était une chose que je n'envisageais qu'en dernier recours était désormais mon but premier. C'était un changement majeur de ne plus avoir quoique ce soit à perdre. Le tuer était tentant, mettre fin à tout ça, à cette obsession et à ce cauchemar, même si je ne peux pas cacher que perdre un tel challenge rendrait surement ma vie encore plus terne. Mais au fond, je n'y survivrai peut-être pas de toute manière.

Et c'est à ce moment qu'un souvenir me frappe de plein fouet, mon ancien chef des auror avait juré ne pas m'avoir sauvée ce jour-là, ce que j'avais prit pour de l'humilité mal placé, en plus d'en avoir à peine parlé, car en ce temps, je ne voulais plus jamais entendre parler de tout ça, je fuyais et je tentais d'oublier... Et si... merlin, ai-je été une si mauvaise auror?

It's my last ambition

(C) Mini BN sur Epicode.

Souvenir d'une Haine...

Jade Crowley & Islay McEwen.

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