...Lewis Styx. Je trouve que ça sonne très mal. Ça sonne comme deux prénoms qui ont tout deux leur propre monde, leur propre façon de raisonner et d'être apprécié. L'un par sa sonorité anglophone, l'autre par sa référence au puissant fleuve des Enfers. Ils sont issus de deux milieux différents, éloignés d'un puissant faussé. Ça fait longtemps que je me suis résolue à penser que les modus et les sorciers n'étaient pas pareils. Ça n'a rien de raciste, j'aime chacun de ces deux mondes, même si celui des sorciers, du moins de sang pur comme la famille, me terrorise. Ma mère était une sorcière, une puissante sorcière issue d'une famille prestigieuse de froids sang purs. Du moins, ils le sont avec moi. Mais maman était différente des membres de sa famille, elle ne résonnait pas comme eux. D'abord parce qu'elle avait toujours voulue être une moldue comme les autres, non pas une sorcière, mais aussi parce qu'elle était éperdument amoureuse d'un moldu : mon père. Ah ... Lui c'était différent. C'était un type des plus banal, un étudiant en médecine, qui avait toujours voulu exercer là dedans depuis tout petit. Il faut le dire, il n'y connaissait pas grand chose au monde de la magie, même plutôt rien du tout. Il était assez apprécié des femmes, pour son beau sourire charmeur, sa fossette au creux de la joue et ses beaux cheveux charbons. Il a rencontré maman totalement par hasard, et ils sont de suite tombés sous le charme l'un de l'autre.

J'ai les yeux de ma mère, du moins c'est ce qu'on me dit. Je n'ai plus aucun souvenir d'elle. Elle s'est suicidée peu après ma naissance, de honte sans doute. La famille la voyait comme une folle, pour eux c'était impensable qu'on puisse tomber amoureux d'un sans-pouvoir, d'un moldu. Je crois que mon père ne s'en est jamais vraiment remit. Je l'ai toujours vu derrière ses petits sourires. Je vois bien ses yeux briller de larmes lorsqu'il parle d'elle.  Ce fut lui qui m'éleva pendant toute ma petite enfance, mais il ne me cacha rien. Il n'y eut aucun secret : ni le suicide de ma mère, ni le fait que j'étais une sorcière, et encore moins celui qu'un jour je devrais voler de mes propres ailes jusqu'à une école pour magiciens.

Pendue dans sa chambre, c'est comme ça qu'on l'a retrouvé. Elle n'était pas normale. Moi non plus d'ailleurs. Je ne l'ai jamais été. D'abord je peux lancer des sorts mais aussi... Je peux voir des choses que les autres sorciers ne voient pas. Des choses... Laides. La plupart de temps il s'agit de corps, de beaux cadavres pâles comme des lys. Parfois ce sont simplement des scènes ou des paysages. Mais peu importe l'image : c'est toujours extrêmement douloureux. Ma tête me tourne, ma respiration se coupe, les mains tremblent, et je sais que c'est re-parti our une nouvelle vision, un nouveau cauchemar auquel je ne comprend jamais la signification.

J'arrivais chez les Yaxley à l'âge de douze ans, comme c'était prévu depuis ma naissance. Je disais au revoir à mon cher père, celui que j'aimais tant, que j'étais condamnée à voir seulement un week-end par mois et une semaine parfois pendant les vacances. J'arrivais de suite dans un tout nouvel environnement. Celui d'une famille de sorciers purs et durs, hautains, mais surtout anciens mangemorts. Ma famille. Tu parles. Tout le monde le haït la bas, aujourd'hui encore. Je suis un peu le vilain petit canard de la famille, la demi moldue, la moitié sans pouvoir, la faible, celle qui ne méritait pas de naître sous le nom des Yaxley et la fille de sa tarée de mère. Enfin... Vite je comprenais la chose. Et vite je devenais solitaire. Moi qui dans le monde moldue passait mon temps à discuter et à me faire de nouveaux amis, bientôt je devenais la fille dans son coin, qui privilégiait la discrétion à la parlote. Je pense que c'est de là qu'est née cette sorte de double personnalité. À cause de les deux façons de me comporter que j'adoptais, et cela aujourd'hui encore, chez mon père et chez les Yaxley.

Ma seule alliée demeura ma cousine, Rocksane, la seule qui daigna passer du temps avec moi et m'adresser la parole sans avoir l'air de vouloir le cracher dessus. Laquelle avec qui je passait énormément de temps.

J'aurai pour toujours ce souvenir, dans la tête, qui est d'ailleurs devenu au fil du temps mon epouventard. Ce fameux souvenir qui se déroula alors que j'avais à peine douze ans, un soir où pendant les vacances de Noël, les elfes de maison se tuaient à essayer de tout préparer pour le grand banquet de la famille Yaxley. Parmi ses créatures courbant le dos, j'avais en effet trouver un ami. Il s'agissait d'un elfe du nom de Sunnor, brave petit être qui chaque jour travaillait avec un peu plus d'acharnement, et qui même avec tout le poids qui pesait sur ses épaules, arrivait à se relever lorsqu'il chutait. Il en était devenu un certain modèle pour moi. Et je partageais même quelques fardeaux avec lui, lorsque je n'avais rien à faire et que j'en avais assez de le voir gémir sous la fatigue. Ce fameux soir de Noël, j'avais passé toute la soirée à côté de Rocksane, pour essayer de passer le temps, et de au moins sourire une fois en cette fête sensée représenter l'espoir. Même si au fond de moi, j'étais irrévocablement déçue de ne pas pouvoir la fêter avec mon père. Vers le milieu du repas, je me levais pour rejoindre les toilettes, m'excusant auprès de ma cousine. Traversant le couloir dans ma robe de dentelle noire, j'entendis soudainement des petits cris étouffés, si intenses que j'en percevais la douleur à travers. Je m'arrêtais net en entendant par la suite des grondements mâles. Je reconnue la voix de l'un de mes oncles. Je m'approchais alors avec prudence de la porte et observait à travers la fente. Il s'agissait bel et bien de Sunnor, affalé sur le sol, couvert de bleus, qui se prenait des coups violents de cannes par mon propre oncle. J'écarquillais les yeux et tournais la poignée sans même réfléchir. L'oncle se retourna sans attendre, il plissa les yeux en ma direction.

- Qu'est ce que vous faites là ?!
- Pourquoi le battez vous ?
- Cela ne vous regarde pas, petite sotte.

Il quitta la pièce sans un mot de plus, claquant la porte. Je me retrouvais seule en compagnie du corps blafard de mon ami, près duquel je m'agenouillais en sanglotant. Connaissant à ce moment là les manières des membres de la famille à l'égard des elfes de maison, je savais bien que Sunnor n'avait plus beaucoup de temps à vivre. Il m'adresse un petit sourire en s'éteignant lentement, et je lui fermais les yeux.
Chaque vacances scolaire arrivait comme un soulagement. Je savais que je retournais voir mon père, et cette idée m'enchantait toujours. Ainsi je rejoignais la riche maison de campagne de mon médecin préféré avec un grand sourire. Je ne manquais jamais d'écrire des lettres à Rocksane, et passais la plupart de mon temps dans les prés à profiter de l'odeur délicieuse qui y régnait. Les vacances chez mon père sonnaient pour moi comme une vague de liberté et de repos, mais aussi de réconfort auprès d'une famille aimante.

Le problème était sans doute qu'au fur et à mesure des années, mes visions devenaient de plus en plus fréquentes. De là à en devenir presse handicapantes. Je tentais d'en parler à mes professeurs, qui m'assurèrent ne pas pouvoir y fait grand chose. On me donna bien des calmants, ou des somnifères, mais cela n'y changea rien.

Encore une nouvelle année, à Poudlard. Ma dernière. Ce sera la dernière fois que je porterai cet uniforme et cette cravate que je chérie tant. Ce sera la dernière fois que je m'endormirai sur mon livre de potion, tellement je déteste cette matière. Enfin, le monde tourne et chaque année redouble de surprise, tout comme ma propre personnalité.

Je m'appelle Lewis Styx Blackstone, j'ai dix sept ans, et je deteste mon prénom, tout autant que mon coté sombre.